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Un projet de loi sur la gestion de la dette publique à l’assemblée nationale

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Saandi_Mouignidaho

FINANCES PUBLIQUES. Selon le projet de loi, le ministère des Finances peut emprunter uniquement pour financer les déficits budgétaires, ou financer les projets d’investissements approuvés par l’Assemblée nationale. Il peut aussi emprunter au nom du gouvernement pour fournir des prêts ou crédits gouvernementaux aux conseils locaux, aux entreprises publiques et aux autres entités.


Un projet de loi sur la gestion de la dette publique est en ce moment aux mains de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Ce projet du ministère des Finances vise à définir le champ d’une politique d’endettement unique, jusqu’ici éclaté. Ces politiques nationales d’endettement public devront obligatoirement être annexées à la loi des finances. La loi fixe les règles relatives aux besoins de l’endettement et les principes afin de réduire les risques associés au surendettement.

Il va s’agir de mettre en place un cadre institutionnel dans l’objectif, entre autres, de minimiser le coût du portefeuille de la dette à moyen et à long terme et de maintenir un niveau acceptable des risques associés au portefeuille des créances. Avec cette loi, le ministère des Finances deviendra l’unique autorité compétente pour signer, pour le compte et au nom du gouvernement comorien, les conventions d’emprunt public et tous autres accords relatifs à la dette publique.

Selon le projet de loi, le ministère des Finances peut emprunter uniquement pour financer les déficits budgétaires et de liquidité du gouvernement, ou financer les projets d’investissements approuvés par l’Assemblée nationale. Il peut aussi emprunter au nom du gouvernement pour fournir des prêts ou crédits gouvernementaux aux conseils locaux, aux entreprises publiques et aux autres entités qui pourront être approuvées par l’assemblée, ou pour honorer des obligations à titre exceptionnel pour les garanties publiques.

Une copie de chaque engagement de prêt doit être déposée à l’assemblée nationale pendant les quinze jours qui suivent la signature de l’engagement ou lors de la première rencontre de l’assemblée si elle est en congé. Chaque emprunt ainsi déposé doit être accompagné des documents nécessaires qui font mention de la viabilité de la dette, une analyse du taux de risques et les termes de l’engagement. La contraction de chaque contrat d’emprunt par l’Etat ou toute offre de financement fait à l’Etat doit être communiquée à la commission des finances de l’assemblée nationale.

Pour ce faire, le ministère des Finances définit une stratégie qui doit indiquer la façon dont le gouvernement devrait gérer la dette publique des Comores pour les trois années suivant l’année où la stratégie est formulée. Cette stratégie doit prendre en considération, notamment le cadre macro-économique, les besoins de financement présents et futurs du gouvernement et les conditions du marché. Deux principales structures, sous tutelle du ministère des Finances, seront mises à contribution dans la coordination et le suivi de la gestion de la dette publique, ainsi que la formulation de la politique d’endettement. Il s’agit de la Direction de la dette publique, qui sera chargée de la mobilisation des ressources, des études et analyses, et de la gestion de la base de données. L’autre structure est le Comité national de la dette publique, qui veille au respect des orientations et objectifs du gouvernement en matière de soutenance des finances publiques et de viabilité de la dette publique.

C’est ce comité qui valide la stratégie d’endettement et le fait présenter au ministre des Finances. Il suit la mise en œuvre de la stratégie nationale en matière d’endettement et de gestion de la dette. La coordination des actions des administrations et des organismes intervenant dans le processus d’endettement et de gestion de la dette est aussi assurée par le Comité national de la dette publique.

Résumé de Kamardine Soulé

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Trois questions à Saandi Mouignidaho, directeur national de la dette publique


Pourquoi une loi sur la gestion de la dette?

Primo, c’est une conditionnalité de ceux qui nous ont appuyés après le point d’achèvement de l’Initiative pays pauvres très endettés (Ippte) du Fonds monétaire international (Fmi). Il ne faut pas que nous retombions dans le cercle vicieux du surendettement. Comme c’était le cas dans les années antérieures. Donc, il faut assainir afin de pouvoir emprunter, dans la conformité de la politique macroéconomique du pays. L’approche maintenant avec ce projet de loi envoyé à l’assemblée nationale est de créer un cadre légal pour exprimer les besoins de financement et montrer leur nécessité, tout en respectant des seuils bien définis. [...] Vous savez, l’historique de notre dette, surtout extérieure, remonte aux années 70, à partir de notre indépendance en 1975. L’Etat a été obligé de se prendre en charge. Et dans ce contexte là, il y a eu des financements extérieurs venus pour financer les infrastructures de base sans qu’il y ait de garanties ou une stratégie pour gérer ces dettes là. Donc, nous sommes arrivés à un stade où tout a été surendetté. C’est-à-dire nous étions pris au cou, nous n’arrivions pas à savoir si les capacités financières de l’Etat étaient en mesure d’honorer ces dettes là. Ce qui fait qu’aux années 2005, le Fonds monétaire a eu une autre approche de la gestion de la dette, en disant qu’on ne fait que cibler les Omd (Objectifs du millénaire pour le développement).
Avec l’appui de la Banque mondiale, le Fonds est intervenu en donnant des conditionnalités. Et des programmes ont été crées à cet effet, notamment le programme Frpc, devenu Fec. Entre 2008, 2009, nous avons eu la chance de décrocher le programme, qui s’est achevé en 2012-2013. Et pour les trois ans, nous avons pu quand même suivre le rythme de réduction et le paiement de la dette qui étaient la priorité, ainsi que le paiement des salaires des fonctionnaires.


A combien s’élève notre dette publique aujourd’hui ?

Le stock de notre dette extérieure, latérale et multilatérale, est évalué à 41 milliards de francs, au sortir du programme Initiative pays pauvres très endettés du Fonds monétaire en 2013. Ce stock était de l’ordre de 95 milliards de francs en 2009, c’est-à-dire avant la fin du programme. Donc le point d’achèvement de ladite initiative a permis d’éponger jusqu’à 50% de notre dette extérieure. La partie non épongée lors de l’accession des Comores au point d’achèvement, ce sont les dettes dites commerciales et autres n’entrant pas dans le volet de financement du développement des infrastructures de base. Et les dettes des autres bailleurs non membres du club de Paris, comme la Banque islamique de développement, le Fonds saoudien ou d’Abu-Dhabi, Koweït et Maurice.
Pour ce qui est de la dette intérieure. On parle de dette au sens juridique du terme, s’il y a contrat de prestation de service ou autre entre deux parties. Nous ne pouvons pas parler de dette intérieure, car il n’y pas eu de contrat. Sinon, il y a eu des états d’arriérés. Il y a des arriérés intérieures mais pas de dette intérieure.
On dit arriérés parce que nous savons qu’il y a un stock d’arriérés de salaires des fonctionnaires, qui datent d’une période à une autre. Mais il n’y a jamais eu de contrat de prestations, en tout cas pas à la connaissance des autorités habilitées à établir ces contrats. S’il y a eu des prestations de services faits à l’Etat, mais nous n’avons pas eu le temps matériel de nous asseoir pour vérifier si le service a été rendu ou non.
Il y a eu en 2010 un rapport d’audit des arriérés intérieurs de l’Etat, initié par l’Union européenne, qui avait révélé des arrièrés d’un montant d’environ 8 milliards de francs.


Quel est le poids de cette dette dans notre économie ?

Pour donner un exemple beaucoup plus explicite, cette année en cours, l’Etat comorien va consacrer 715 millions de francs, rien que pour le paiement du service de sa dette extérieure. Cette charge dans le budget de l’Etat sera de l’ordre de 718 millions de francs l’année prochaine. Là, nous avons beaucoup progressé, car il fut un temps, avant le programme Ippte, où l’Etat pouvait consacrer jusqu’à 2 milliards de francs par an. […] Nous pouvons dire qu’aujourd’hui, nous sommes quand même à un rythme que nous appelons viabilité de la dette. Maintenant, la dette rentre dans les capacités des ressources internes du pays. Alors qu’avant nous faisions des prêts négatifs. C’est-à-dire que nous faisions des transferts négatifs ; autrement dit, nous payions plus par rapport à ce qu’on nous donnait.

Propos recueillis par Ks