Imprimer

«Dinos». Débat autour d’un retour

Le .

Joomla
Joomla

Wordpress
Wordpress

alwatwan actu image 

 

DIVERGENCE. Pour certains, le fait que des sexagénaires et autres fringants octogénaires veuillent reprendre «du service» n’est rien d’autre qu’une gifle assénée à une jeunesse qui ne porterait en elle aucun idéal.

 

Saïd Ahmed Saïd Ali, Ali Nassor, Ali Bazi Selim, Omar Tamou, etc. On assiste, ces derniers temps, à un retour des ‘‘dinosaures’’ sur la scène politique. Si les uns ne cachent plus leurs ambitions présidentielles, les autres cherchent tout simplement à peser dans le débat politique national. Peut-on interpréter le réveil de ces ‘‘éléphants’’ comme l’illustration de l’échec de la nouvelle génération?

Les avis sont, en tout cas, partagés. ‘‘C’est une bonne initiative que nos ainés veuillent reprendre les affaires, car ils ont le savoir-faire dont le pays a besoin’’, soutient l’ambassadeur Mahmoud Soilih alias Lamartine. Selon lui, la crise qui secoue le pays, et qui légitime peut-être le retour de ces politiques du troisième âge, n’est pas une crise de défiance, ‘‘mais une crise d’adolescence, dans le sens où ce sont les enfants des dinosaures qui gouvernent aujourd’hui’’. Crise d’adolescence, l’expression est lourde de sens.

«Communautarisme»

Saïd Ahmed Saïd Ali, estime quant à lui que sa génération ‘‘a servi la Nation dans la mesure du possible et nous avons contribué à la formation des dirigeants d’aujourd’hui’’. Il s’empresse, cependant, d’ajouter : «notre déception est grande car nous ne pouvons que constater le mauvais fonctionnement de la gestion des affaires de l’Etat». Il va encore plus loin : ‘‘nous avions la volonté de bâtir une Nation mais nous sommes tombés dans le communautarisme, le vivre-ensemble est aujourd’hui vidé de tout son sens, les institutions issues de la tournante affaiblissent la Nation’’.

Selon ce candidat déclaré,  pour le compte du parti Udzima à la présidentielle de 2016, «l’un des problèmes majeurs de ce pays, c’est que nous ne voulons pas reconnaître l’expertise, j’ai fait de la prison sous Ali Soilihi alors que j’avais trente ans. En 1985, j’ai été nommé ministre des Finances sous Ahmed Abdallah Abderemane». 

Et d’enfoncer le clou : «la plupart des  leaders politiques actuels le sont que parce qu’ils ont été nommés ministres, et parce qu’ils ont pu rendre quelques services, la politique ce n’est pas de l’amateurisme : nos trois derniers présidents n’ont jamais milité politiquement, un comble», s’est-il exclamé.

Cette expérience dont se prévalent les dinosaures n’est pas perçue de la même manière par tout le monde, loin de là. «Ce retour est inquiétant, c’est un symbole des pays en régression. Les mêmes qui ont plongé le pays dans les abysses prétendent par miracle disposer des outils pour un sauvetage à l’heure d’une paisible retraite», a ainsi martelé Idjabou Bakari, de Radio Dounia Web.

 

Deux générations

Me Moudjahid Aboulbastoi, avocat, n’en pense pas moins : «ce retour enverrait un mauvais message au reste du monde, car cela signifierait que le peuple est tellement désespéré au point de faire appel à ceux qui ont échoué à former leur propre successeur et qui vont une nouvelle fois, échouer car ils sont trop âgés pour comprendre les mutations qu’a connu le monde depuis leur passage au troisième âge ».

Si l’ancien gouverneur de la Banque centrale est prêt à débattre avec tous les candidats, afin de prouver qu’il est «tout sauf dépassé», comme d’aucuns le pensent, l’universitaire et syndicaliste Ibouroi Ali Toibibou, lui, préfère s’interroger : «Est-ce que nous pouvons aujourd’hui refuser leur retour? ».

Au-delà du fait que rien dans la constitution ne l’interdit, «bien que Ali Bazi Selim ait fait partie d’un gouvernement qui a son lot de casseroles, cela n’entame en rien la véracité du discours qu’il a tenue le 11 août dernier», a déclaré le syndicaliste.

Et d’interroger: «Aujourd’hui, Ali Soilihi Mtsashiwa est considéré comme ayant été un bon président, est-ce que cela veut dire qu’on lui pardonne toutes les atrocités et autres bavures qui ont eu lieu lors de sa présidence ? », s’interroge encore Ibouroi Ali Tabibou.

En tout cas, la crise, elle, est profonde. Les deux générations dévraient se remettre en question. Que chacune prenne ses responsabilités face à l’histoire si l’on veut espérer le sursaut national.

Faïza Soulé Youssouf