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‘‘Le gouvernement doit abroger le code des investissements pour mettre Telma et Comores Télécom sur un même pied d’égalité’’

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Selon Le secrétaire général du Syndicat des agents de Comores Télécom, Moustoifa Saïd Hassani, il y aurait dans l’arrivée du second opérateur, des choses pas nettes. La manière dont les choses se sont passées laisse penser qu’il “y a anguille sous roche”, qu’une poignée de gens se sont enrichis dans cette opération sur le dos des petits gens comoriens. “Un jour ou l’autre on saura la vérité et ces gens-là auront à répondre devant la justice. Sha, he wa Komoreee!, c’est nous qui souffrons de la disparition de Galawa et d’Air Comores, ne laissons pas mourir Comores Télécom...”, avertit-il.

 

Al-watwan : Un nouvel opérateur fera prochainement son entrée dans le secteur des télécommunications. Comment les agents de Comores Télécom ont réagi par rapport à cette nouvelle?

Moustoifa Saïd Hassani : Je vous mentirai si je vous disais qu’ils ne sont pas inquiets, sachant les avantages accordés au nouvel opérateur à savoir, entre autres, une attribution d’une licence dite globale de télécommunications (mobile, fixe, internet et que sait-on encore) à un prix dérisoire, un manque de cahier de charges en bonne et due forme qui définirait les obligations du nouvel opérateur, notamment la couverture du réseau et les emplois qu’il va créer, des exonérations fiscales et douanières pendant dix ans, pendant que Comores Telecom est obligé de payer les taxes fiscales et douanières, d’opérer des investissements et des recrutements à caractère politique, de supporter les lourdes dépenses et arriérés de l’Etat et de l’Ortc en matière de télécommunications.

Les agents de Comores Télécom ne mettent pas en cause le principe de l’arrivée d’un nouvel opérateur, c’est le fait qu’aucune mesure n’a été prise par les autorités politiques pour préparer Comores Télécom à la concurrence. Plus inquiétant encore, c’est la brutalité avec laquelle l’Anrtic et la Cref ont mené ce processus tout en se basant sur une loi-pirate, non adoptée par l’assemblée nationale.

Tout cela nous amène à penser qu’il y a anguille sous roche et qu’une une poignée de gens se sont enrichis dans cette opération sur le dos des petits gens comoriens. Un jour ou l’autre on saura la vérité et ces gens-là auront à répondre devant la justice. Sha, he wa Komoreee!, c’est nous qui souffrons de la disparition de Galawa et d’Air Comores, ne laissons pas mourir Comores Télécom...

Al-watwan : Vous dénoncez le manque de cahier de charges, alors que, lors de l’ouverture publique des offres, chaque opérateur avait fait des propositions sous formes d’investissements, assorties d’un plan stratégique avec, entre autres, un plan de déploiement et le niveau des investissements…

MSH. : Normalement, un cahier de charges d’un appel d’offres doit être publié et communiqué partout bien à l’avance. A plusieurs reprises, nous avons demandé d’avoir accès au cahier de charges, on ne nous l’a jamais montré. Le cahier de charges détermine entre autres les obligations du nouvel opérateur surtout en matière de couverture réseau, d’investissement, de recrutement, etc. et cela n’a rien à voir avec l’ouverture des plis.

 

Al-watwan : Sur la base de quoi jugez-vous le prix de la licence, plus de 7 milliards de francs proposé par Telma, dérisoire?

MSH. : Parce qu’il s’agit d’une licence globale (fixe, mobile, internet) sur 15 ans. Il fallait fixer un prix minimum comme tout le monde au lieu de prendre le mieux disant.

 

Al-watwan : Pour ce qui est des exonérations, vous semblez oublier le décret N° 15-61/Pr fixant le régime applicable aux investissements des entreprises de communications électroniques, dont l’article 14 réduit les durées d’exonération dans ce secteur considéré comme spécifique et qui a un retour sur investissement très rapide…

MSH. : ... Même si c’est une exonération d’un mois, ça sera un mois de concurrence déloyale car Comores Telecom a payé et continuera à payer toutes les taxes douanières et fiscales. Si vous prenez l’exemple d’une centrale Gsm qui coute environ 500 millions, ça nous revient à 750 millions du fait des taxes de douanes de 49% pendant que ça va revenir à 500 millions à Telma. Je tiens aussi à rappeler qu’une loi ne peut pas être abrogée par un décret, juridiquement, c’est inconcevable.

 

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Al-watwan : La loi sur les communications électroniques, que vous appelez de “loi pirate”  a quand même été adoptée le 17 mars 2014 par les députés, en session plénière extraordinaire, le même jour que les deux contrats de partage pétrolier…

MSH. : Elle n’a pas été adoptée en plénière, les députés Fatah et Mzimba, entre autres, me l’ont confirmé et le quotidien La Gazette des Comores a bel et bien indiqué qu’il semblerait même que cette loi ne figure pas dans les archives. Les députés en exercice ont beau chercher partout à l’assemblée nationale, ils n’en ont trouvé aucune trace. Et même Assafi de l’Anrtic a confirmé sur Internet que cette loi a été promulguée par le Président de la République sans avoir été adoptée par l’assemblée nationale.

 

Al-Watwan : On parle d’un effectif pléthorique à Comores Télécom, ne répondant pas forcement aux besoins de la société, ne craignez-vous un déflatage, à l’arrivée de la concurrence ?

MSH. : D’abord, ce n’est pas à moi de juger si l’effectif est pléthorique ou s’il ne répond pas aux besoins. Il faudra poser la question aux autorités politiques car jusqu’à preuve du contraire Comores Télécom est une entreprise publique. Mon rôle en tant que syndicaliste est de défendre les intérêts des employés et j’irai jusqu’au bout pour défendre les droits de ceux qui m’ont élu pour les représenter quand bien même certaines personnes se soulèvent pour demander mon licenciement. En termes de fournitures de services, je pense que nous avons des équipements sophistiqués et un personnel qualifié pour faire face à la concurrence. Seulement nous avons besoin de restructurer la société.

 

Al-watwan : En tant que syndicat des agents de l’opérateur public, qu’attendez-vous de la part de la direction de votre employeur, du régulateur des Tic et des autorités politiques?

MSH. : Je préconise que la direction générale se rapproche des autorités politiques pour leur présenter les enjeux et les menaces de l’arrivée immédiate d’un nouveau concurrent et leur demander de suspendre l’octroi de la licence puis d’accorder un moratoire de deux ans à Comores Télécom pour se restructurer afin de mieux se préparer à la concurrence.

De l’Autorité nationale de régulation, j’attends à ce qu’elle reprenne le processus en respectant toutes les normes juridiques relatives à une attribution de licence en télécommunications : une licence de téléphonie mobile seulement au lieu de globale, un cahier de charges doit exister et être communiqué suivi d’un appel d’offres fixant un prix minimal.

Aux autorités politiques, je demande de concevoir et d’adopter une nouvelle loi sur les communications électroniques en remplacement de la loi pirate de décembre 2014 en la matière et d’abroger le code des investissements afin de mettre le nouvel opérateur et Comores Télécom dans le même pied d’égalité en matière de fiscalités et douanes. Je leur demande également de trouver une solution aux arriérés des factures des télécommunications (téléphone fixe, téléphone mobile, interne, liaison spécialisés, location des circuits nationaux et internationaux) de l’Etat et de l’Ortc.

Propos recueillis par Kamardine Soulé