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Saisie du matériel de Cgh à Ndzuani : Le personnel inquiet de son avenir refuse d’évacuer le site

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BATAILLE JURIDIQUE. L’huissier a ordonné au directeur des opérations de Comoro-Golf Holding et gérant du site de Wani, de «payer immédiatement» 6 milliards de francs comoriens, la somme que l’Etat comorien réclame à Bashar Kiwan, patron de Cgh. Mais, selon l’huissier de Cgh, la Bfc est déjà propriétaire du «fonds de commerce étendu au matériel et aux équipements d’exploitation» de Cgh, et ce depuis le 29 août 2012.


Comme ordonné par la justice comorienne, la vice-présidence en charge des Finances a procédé à la saisie des équipements de la représentation anjouanaise du consortium Comoro Gulf Holding. Le procès-verbal de saisie a été dressé le mardi 11 mai au site de concassage de Wani par Madjidi Combo, l’huissier de justice mandaté par la vice-présidence. Ce dernier y a répertorié «184 équipements, 3 tas de sable et un grand magasin de stockage non inventorié».
L’huissier a ordonné à Elie Yasbech, le directeur des opérations de Comoro-Golf Holding et gérant du site de Wani, de «payer immédiatement» 6 milliards de francs comoriens, la somme que l’Etat comorien réclame à Bashar Kiwan, patron de Cgh. A ce montant s’ajoute un peu plus de 840 millions de droits d’enregistrement et de frais d’huissier. Mais samedi encore, le matériel saisi se trouvait toujours dans le site, sous gardiennage d’éléments de la gendarmerie, et le personnel de l’entreprise refusait toujours d’évacuer les lieux.

Le personnel, c’est d’ailleurs le nœud du problème, à en croire même Elie Yasbech. «Ils [l’huissier et les gendarmes] nous ont signifié que ces machines doivent être vendues sur une place publique et nous ont assuré qu’il n’y aura pas de continuité, ce qui n’a pourtant pas été le cas à l’hôtel Itsandra, où les employés ont été gardés. Ce qui me préoccupe moi, c’est le volet socio-économique de cette affaire : je défends une cause humaine ; je suis du côté de ces employés que l’on veut précipiter au chômage», soutient-il.

Les concernés eux-mêmes sont loin de se résigner. «Nous, on est là et on ne partira pas. On travaille ici depuis 2009, et si on veut aujourd’hui vendre ou fermer l’entreprise, il faudra qu’on nous paie d’abord nos droits et nos arriérés», lance Said Ahmed, délégué du personnel. Les droits revendiqués s’articulent autour de «droits de licenciement, préavis et congé». Sa collègue, Rakchina Allaoui, lira devant les journalistes un communiqué rédigé la veille par le collectif des employés. Le communiqué disant s’adresser à «certains dirigeants élus», rapporte que «l’Etat veut déraciner cette entreprise» qui a pourtant «permis une baisse du chômage de la région», et pose la question de «qui va nous prendre en charge en cas de licenciement forcé ?».

Il faut savoir que la vente des équipements du site de concassage de Cgh et la fermeture de celui-ci à Wani pose de nombreux autres problèmes à part celui de mise au chômage de 65 chefs de familles. En effet, la production d’agrégats par la société en avait sensiblement réduit le coût et limité l’extraction du sable marin à Ndzuani. La lettre d’autorisation officielle du secrétariat général du gouvernorat de l’île, en date du 15 novembre 2011, avait d’ailleurs bien soulevé cet aspect avantageux.

Il faut surtout rappeler que Cgh a été retenu pour assurer les travaux d’entretien courant des routes au niveau de Ndzuani, et que la société aurait déjà du entamer ces travaux sur 62 kilomètres de route depuis le 10 mai. Enfin, la fermeture de Cgh ralentira les travaux de construction de l’hôpital Sheikh Jassim Bin Jabor Al-Thani de Mutsamudu, et ceux du projet d’alimentation en eau potable et assainissement actuellement en cours dans certaines régions de Ndzuani, en coupant brusquement la fourniture de sable et d’agrégats.

Mais d’autre part, l’on est encore en droit de penser que tout n’est peut-être pas encore réglé dans ce dossier, et que le sort du site n’est pas encore tout à fait scellé. En effet, vendredi après-midi encore, la bataille judiciaire continuait au palais de justice de Mutsamudu, et cette fois c’est la Banque fédérale de commerce (Bfc) qui intervient pour tenter de faire arrêter la procédure de vente.

Cette dernière, selon Anthoumane Youssouf, huissier de Cgh, est déjà propriétaire du «fonds de commerce étendu au matériel et aux équipements d’exploitation» de Cgh, et ce depuis le 29 août 2012. Ceci en vertu d’un acte de nantissement signé entre les deux sociétés comme gage d’un prêt 2,94 milliards de francs accordés par la banque à Cgh, alors en difficultés financières. Et il semble que la Bfc aurait déjà procédé à la saisie des biens de Cgh le 14 mars 2014. C’est donc ainsi que, pour s’opposer à la saisie du gouvernement, la Bfc se prévaut aujourd’hui de «l’article 140 de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution», selon lequel «le débiteur peut demander la nullité de la saisie portant sur bien dont il n’est pas propriétaire». Une affaire qui s’annonce longue…

Sardou Moussa